Au-delà du symbole et du rêve

Par Elisa Rojas

Vu le tapage médiatique autour de cette initiative, je voudrais dire quelques mots sur l’opération intitulée « Mélanie peut le faire » qui se propose de réaliser le rêve d’une jeune femme de 21 ans, ayant le syndrome de Down (autrement appelé trisomie 21), de présenter la météo à la télé.

Pour remettre les choses en perspective, rappelons que cette campagne est une opération de communication de l’UNAPEI, une fédération d’associations de défense des intérêts des personnes handicapées mentales et de leurs familles, telle qu’elle se définit elle-même [1]. Elle regroupe plus de 500 associations de bénévoles, parents et amis de personnes concernées par le handicap.

L’UNAPEI est une fédération, bien entendu… gestionnaire et pas des moindres puisqu’il s’agit de la principale organisation gestionnaire en France. Elle compte à ce jour 3 117 établissements et services médico-sociaux.

Comme toutes les organisations gestionnaires, elle a amplement participé à la politique d’institutionnalisation des personnes handicapées sur ces cinquante dernières années, dont vous savez tout le bien que je pense.

Elle n’est d’ailleurs pas tellement disposée à faire « tomber les murs » et a une définition plutôt light de la désinstitutionnalisation que l’on peut lire dans son rapport d’activité [2] :

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Analyse intéressante n’est-il pas ? Si ce n’est que les « murs de la société » doivent beaucoup à ceux des institutions… comme certains d’entre nous se tuent à l’expliquer.

Pour ce qui est de la campagne, je regrette sans m’en étonner, venant d’une organisation gestionnaire, qu’elle soit axée autour du « rêve » de la jeune femme dont il est question, de présenter la météo.

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Pourquoi parler de « rêve », un mot quelque peu infantilisant pour une jeune femme majeure de 21 ans, pour traiter ce qui pourrait potentiellement, et légitimement, constituer un véritable projet professionnel ? Après tout, de nombreuses personnes vivent de la présentation de la météo, à la télé comme à la radio [3], qui est une activité certes médiatisée, mais pas totalement hors de portée.

Peut-être parce que lorsque vous êtes une personne handicapée et que vous exprimez l’envie de faire quoi que ce soit, on a vite fait de qualifier cette envie de « rêve. » Les personnes handicapées sont de doux(ces) « rêveurs(es) ». Elles voudraient – imaginiez un peu – choisir leur vie, circuler comme bon leur semble, être avocat (sérieusement ?!), danser, voter pour Fillon (je blague [4]), et même faire du deltaplane [5] !

En faisant une rapide recherche sur Google, il ne m’a pas fallu longtemps pour trouver quantité d’articles qui attestent de ce dangereux penchant que nous autres, « handicapés », avons pour la rêverie. La rêverie individuelle toujours, pas collective sinon ce serait un projet politique et ça c’est moins sexy médiatiquement.

Petit florilège…